Moins connu que d’autres baies ‒dont l’emblématique myrtille‒, le cassis brille pourtant par ses qualités gustatives et nutritionnelles!

Cette délicieuse et juteuse baie noir violacé, que l’on apprécie le plus souvent sous forme de sorbet, de sirop ou de liqueur, mériterait vraiment une plus grande place sur nos étals, tant ses qualités nutritionnelles sont exceptionnelles. Au point que le cassis est considéré par certains comme un super-fruit!

Quels faits remarquables, voire insolites, entourent ce cousin du raisinet (nom romand de la groseille rouge)? Et qu’entend-on par super-fruit ou super-aliment?

Histoire

Le cassis (certains ne prononceront pas le s final), est le fruit du cassissier (Ribes nigrum, Groseiller noir, littéralement), qu’on nomme souvent aussi cassis, comme le fruit. Proche cousin du groseillier (genre Ribes), cet arbrisseau de la famille des Grossulariacées est originaire des régions du nord, de l’est et du centre de l’Europe ainsi que d’Asie septentrionale. Le cassis était inconnu des Grecs et des Romains.

Page des Grandes Heures d'Anne de Bretagne (vers 1503-1508). Parchemin enluminé par Jean Bourdichon (1457-1521). Le cassis y est dénommé "Piperi rotondi"

Grandes Heures d’Anne de Bretagne (vers 1503-1508). Parchemin enluminé par Jean Bourdichon

Le cassissier commence à être cultivé en Russie au XIe siècle dans les jardins des monastères et dans les villes. Au XVIe siècle, la méthode botanique s’organise, les illustrations botaniques connaissent un renouveau avec la gravure sur bois, et pour la première fois apparaissent des inventaires de flores locales. Au tout début du XVIe siècle (vers 1503-1508), en France, le cassissier est dessiné, sous le nom de piperi rotondi, dans les marges historiées des Grandes Heures par l’enlumineur Jean Bourdichon (1457-1521), œuvrant pour Anne de Bretagne.

S’il semble qu’en France le cassissier est initialement cultivé pour ses feuilles, recherchées pour leurs propriétés anti-rhumatismales, en 1571, le botaniste bâlois Gaspard Bauhin rapporte que le cassis est cultivé dans son canton comme fruit de table. Un botaniste et médecin des Pays-Bas bourguignons (actuelle Région flamande, en Belgique), Rembert Dodoens, en donne la première description botanique en 1583.

En 1724, l’abbé Pierre Bailly de Montaran, docteur de Sorbonne, publie une brochure sur “les propriétés admirables du cassis”. À partir de 1747 suivront du même auteur plusieurs éditions du Traité du cassis, dans lequel on lit qu’il guérit un nombre incroyable de maladies –fièvres, migraine, panaris, goutte– et soulage des piqûres de frelons, de guêpes, d’abeilles, de bêtes venimeuses, voire de la morsure de chiens enragés, etc.

Selon l’abbé Bailly, « Tout ce qu’on peut dire du Cassis, c’est qu’il est un très-excellent Elixir de vie qui entretient la santé, & qui fait que les personnes âgées paroissent plus jeunes qu’elles ne sont ». Ce sont les écrits très valorisants de Pierre Bailly qui lanceront la culture du cassis en France.

Le cassis est alors très vite auréolé d’une solide réputation médicinale (vertus notamment stomachiques –salutaires à l’estomac, favorisant la digestion– et diurétiques), ce qui incite beaucoup de Français du XVIIIe siècle à en planter un pied dans leur jardin.

Au XIXe siècle, le « blanc-cassis » (ou blanc-cass’) entre dans la littérature populaire avec les romans d’Émile Gaboriau. Dans les cafés de l’époque, le pichet de cassis est à la libre disposition du consommateur qui avait pris l’habitude d’arroser le p’tit blanc d’une giclée de cassis pour arrondir des vins un peu « raides ». En 1841, Auguste-Denis Lagoutte produit à Dijon la première liqueur de crème de cassis, connue aujourd’hui dans plusieurs pays.

En 1880, le phylloxéra détruit le vignoble et les vignerons plantent à la place des cassissiers. L’appellation « Cassis de Dijon » (21 décembre 1921) permet de protéger le produit de la concurrence, tout comme l’AOC « Crème de cassis de Bourgogne » obtenue en 1973.

2 infos pour briller au prochain apéro:

C’est le chanoine Kir, truculent maire de Dijon, élu une première fois en 1945 et réélu jusqu’à sa mort en 1968, qui donna son deuxième nom au blanc-cassis (le kir), qu’il servait régulièrement à ses invités.

Le cassis était autrefois appelé le « commun » en patois bourguignon, ce qui a donné le nom de communard à un apéritif bourguignon semblable au kir où un vin rouge remplace le vin blanc.

Verre de kir (blanc-cassis) et petite bouteille de crème de cassis

Kir (blanc-cassis) et mignonette de crème de cassis.

Cassis -Zoom santé

De grands atouts santé

Avec 71,3kcal pour 100g, le cassis frais est peu calorique, qualité d’autant plus appréciable que ses apports nutritionnels sont très intéressants!

Macronutriments

Composée à 80,5% d’eau, cette baie contient 9,68g de sucres pour 100g, soit moins que le reste des fruits frais, qui en recèlent 11,31g pour 100g en moyenne. Le cassis est source de fibres, avec 5,80g pour 100g, au-dessus de la moyenne des autres fruits frais, qui se placent à 2,77g pour 100g en moyenne.

Cette baie est d’ailleurs le deuxième fruit le plus riche en fibres après le fruit de la passion. Pour donner un ordre d’idée, les besoins en fibre d’un adulte oscillent entre 25g et 30g par jour. Notons enfin qu’il contient davantage de protéines que la moyenne des autres fruits frais (1,33g/100g contre 0,93g/100g). 

Minéraux et oligo-éléments

Riche en potassium, le cassis offre l’équivalent de 16,50% des valeurs nutritionnelles de référence (VNR) de ce nutriment, soit 330mg pour 100 g. Du reste, il est le fruit qui en contient le plus après le melon. Ce fruit présente aussi des teneurs notables en manganèse (14% des VNR, soit 0,28mg pour 100g) et en cuivre (9,30% des VNR, soit 0,093mg pour 100g).

Par ailleurs, le cassis est le fruit apportant le plus de fer après la mûre noire, avec une teneur équivalente à 8,36% des VNR (soit 1,17mg pour 100g), et celui qui recèle le plus de phosphore, avec une teneur équivalente à 7,64% de ses VNR (soit 53,50mg pour 100g).

Vitamines

L’un des grands atouts du cassis est indéniablement sa richesse en vitamine C: il en apporte l’équivalent de 226,25% des VNR, soit 181mg pour 100g. Il suffit donc de consommer à peine plus de 42g de ce fruit (soit un peu plus qu’une demi-poignée de grains) chaque jour pour couvrir 100% de ses besoins en acide ascorbique. Cette baie noire est tout simplement le fruit le plus riche en vitamine C, juste après la goyave!

Le cassis contient, bien qu’en quantités plus faibles (inférieures à 7% des VNR),  toutes les vitamines du groupe B, à l’exception des vitamines B8 et B12. Cette famille de micro-nutriments est nécessaire au bon maintien de la peau, du système immunitaire, du système nerveux et du renouvellement cellulaire, en particulier celui des cellules sanguines.

Également source de vitamine E, avec un apport équivalent à 17,50% des VNR, soit 2,10mg pour 100g, le cassis est le fruit le plus doté en vitamine E.

Soulignons que les vitamines C et E ont une action antioxydante, tout comme les polyphénols, eux aussi contenus dans notre baie noire.

Jusqu’ici, toutes les données sont des valeurs moyennes pour le fruit cru, telles que fournies par la Table Ciqual 2020. Les VNR sont issues du Règlement (UE) N°1169/2011 du Parlement européen et du conseil du 25 octobre 2011. Le  croisement de ces deux séries de données et leur commentaire sont tirés de la fiche nutritionnelle du cassis sur le site de l’Agence pour la recherche et l’information en fruits et légumes (Aprifel).

Besoins quotidiens en fibres chez l’adulte

Feuilles de cassis

Feuilles de cassissier

Bourgeons de cassis, cueillis et entassés

Bourgeons de cassissier

Une plante médicinale encore utilisée en phytothérapie traditionnelle

Comme nous l’avons vu, très rapidement après son introduction en France au XVIe siècle, le cassis acquiert rapidement une grande réputation médicinale, et les Français le considèrent au XVIIIe siècle comme une véritable panacée (notamment contre les migraines, les fièvres et les rhumatismes).

En phytothérapie

De cette tradition médicinale subsistent un ensemble d’applications. Les feuilles et les fruits du cassis sont couramment employés en phytothérapie comme diurétique et pour traiter les problèmes d’insuffisance veineuse, ainsi que les douleurs articulaires liées à l’arthrose et aux rhumatismes. Par ailleurs, l’huile de pépins de cassis a récemment été vantée pour sa richesse en acides gras essentiels oméga-3 et oméga-6.

En phytothérapie, on utilise les baies cueillies à maturité, et les feuilles ainsi que les bourgeons récoltés au printemps. Séchés, bourgeons et feuilles sont traditionnellement utilisés pour traiter les manifestations de l’insuffisance veineuse (jambes lourdes), des hémorroïdes et de la fragilité des capillaires (ecchymoses). Soulignons que ce sont les bourgeons qui contiennent le plus de principes actifs.

On les utilise également pour soulager les douleurs liées à l’arthrose (rhumatismes) et pour augmenter le volume des urines lors d’une infection urinaire. En application externe, les préparations à base de baie de cassis auraient une action cicatrisante et accéléreraient la guérison des piqûres d’insectes. 

Quelle efficacité phytothérapeutique pour le cassis?

Les bourgeons, feuilles, baies et l’huile de pépins de cassis n’ont fait l’objet d’aucune étude clinique sérieuse chez l’homme. Une très petite étude portant sur environ 40 patients a suggéré un effet stimulant de l’huile de pépins de cassis sur le système immunitaire de personnes âgées. Chez l’animal, les feuilles et les baies ont montré une certaine activité anti-inflammatoire, diurétique et hypotensive.

Néanmoins, l’usage du cassis ne repose que sur la tradition, et des études rigoureuses sont ‒et doivent encore‒ être menées pour établir scientifiquement l’efficacité chez l’homme des produits d’herboristerie et phytothérapeutiques dans leurs différentes applications.

Source: https://www.vidal.fr/parapharmacie/phytotherapie-plantes/cassis-ribes-nigrum.html

Le cassis, un super-aliment?

Au vu de ses qualités nutritionnelles et de la longue tradition médicinale qui l’entoure, le cassis semble mériter amplement le qualificatif de super-fruit. Mais qu’entend-on au juste par super-fruit ou super-aliment?

Bien que les néologismes “superaliment” ou “superfruit” ne correspondent à aucune définition officielle, il s’agirait d’aliments présentant une teneur en vitamines, minéraux et autres nutriments particulièrement élevée, et offrant par là-même des bienfaits remarquables pour la santé.

Voilà pour la définition généralement retenue. Mais pour véritablement saisir les tenants et les aboutissants de ce sujet ô combien d’actualité, c’est par ici -> La ruée vers les super-aliments?

Rameau de cassissier chargé de grappes

Rameau de cassissier chargé de grappes

Cassissiers alignés dans un champ. Port érigé, non palissé.

Lignes de cassissiers dans un champ

La plante

Le cassissier est un arbrisseau, au sens qu’il est de petite taille (1,5 à 2 mètres au maximum) et que sa tige, autrement dit la partie qui sort de terre, se divise en rameaux dès sa base: il s’agit donc d’une plante buissonnante.

Le cassissier se plaît dans les terres profondes, argileuses, riches en humus, neutres à acides. L’exposition idéale est mi-ombre. La multiplication se pratique habituellement par bouturage. Étant donné sa répartition géographique à l’état naturel, c’est une plante rustique résistant en général à une température de -20°C et appréciant les régions froides et/ou montagneuses.

Ses feuilles sont alternes, c’est-à-dire qu’elles sont disposées de chaque côté de la tige, à des hauteurs différentes. Cordiformes (en forme de cœur), elles mesurent 5 à 10 cm de longueur, présentent 3 ou 5 lobes dentés de forme triangulaire, et leur face inférieure est velue.

Ses fleurs sont petites, souvent rougeâtres à l’intérieur et vertes à l’extérieur, en grappes pendantes (voir ci-dessous).

Le cassis chez les parfumeurs

Lorsqu’il ne porte pas encore de fruits, le cassissier se différencie d’un arbuste du genre des groseilliers (rouges) par l’odeur caractéristique produite par ses feuilles au froissement entre les doigts. 

En effet, la face inférieure de ses feuilles est velue et garnie de glandes jaunâtres résineuses qui dégagent l’odeur caractéristique de « cassis » dès qu’on les froisse.

Depuis  les années 1970, les parfumeurs de Grasse s’intéressent aux bourgeons qui donnent une note herbacée et amère, et exerce un effet fixateur qui fait durer l’odeur du parfum sur la peau.

Les parfumeurs exigeant de la qualité, certains arboriculteurs se sont spécialisés dans la culture des cassissiers pour leurs bourgeons, principalement de la variété “Noir de Bourgogne”.

Les bourgeons sont un produit onéreux et l’essence de cassis est essentiellement utilisée en parfumerie de luxe. On la trouve notamment dans les parfums masculins à odeur de conifère.

Grappes de fleurs de cassissier

Le fruit

Les grains de cassis sont des baies globuleuses d’un diamètre allant de 12 à 15 millimètres et formant des grappes. Le plus souvent noirs, ils sont pulpeux, leur peau est lisse, et ils sont ornés d’une petite touffe rappelant la forme d’une couronne royale, qui est constituée des restes des calices desséchés des fleurs dont les fruits sont issus.

Dans nos contrées, le cassis se récolte de fin juin à mi août, suivant les régions, l’altitude et les variétés. La saveur acidulée est bien sucrée et très aromatique. Les petits pépins ne sont pas désagréables à la mastication, mais selon les variétés la peau peut être un peu ferme.

Très fragile, le cassis fraîchement cueilli ne se conserve que 24 à 48 heures au réfrigérateur, principale raison pour laquelle il se fait excessivement rare sur nos étals

Il se conserve néanmoins 8 à 12 mois au congélateur, qu’il soit issu du rayon surgelés de votre magasin préféré ou que vous l’ayez congelé vous-même après l’avoir cueilli.

Cette baie se conserve aussi très bien par dessiccation, et certains producteurs suisses vendent les fruits de leur plantation, séchés en ensachés par leurs soins.

Au bout du compte, le cassis est utilisé principalement par les industries de transformation (liqueur, sirop, gelée, confiture, parfum, produits phytothérapeutiques).

Grappe de cassis
Les variétés

Il existe un très grand nombre de variétés de cassissiers, et il s’en crée de nouvelles chaque année dans le but d’améliorer ou de combiner les caractéristiques d’espèces préexistantes, comme par exemple la vigueur et le rendement des arbrisseaux, l’épaisseur de la peau, la taille, ainsi que le goût des baies, la longueur des grappes et leur nombre de grains, la résistance/tolérance aux maladies (notamment celles dues aux champignons ou aux ravageurs), etc.

Longueur grappes et leurs pédoncule- 6 variétés cassis cultivées en Suisse

Six variétés cultivées en Suisse, évaluées selon la longueur de leurs grappes et de leur pédoncule

Variétés cultivées en Suisse

En Suisse, le cassis est cultivé sur une dizaine d’hectares. Pour répondre à la demande du marché en produits frais, les surfaces pourraient être légèrement augmentées.

Parmi les variétés les plus cultivées en Suisse, citons le Cérès, l’Eva, l’Ojebin, l’Ometa, l’Otelo, ou encore le Titania, dont on retrouve ici une comparaison d’un autre critère, celui de la longueur de la grappe et de son pédoncule (partie de la tige qui la rattache à la branche). Plus le pédoncule des grappes est long, plus la cueillette est aisée (et plus il est facile de la mécaniser).

Source: La culture du cassis, Revue suisse Vitic. Arboric. Hortic. Vol. 40 (2): I-VIII, 2008 V

 

Et puisque vous rêvez de déguster à nouveau ou de découvrir les saveurs cette petite pépite noire, pourquoi ne pas la marier à l’amande dans cette célèbre tarte revisitée?

Notez qu’elle peut parfaitement être réalisée avec des cassis surgelés!

Tarte Amandine au cassis Ptitchef.com
Jérémie Gerlier

Jérémie Gerlier

Partagez nos contenus sans indiscrétion

Agenda

Nos publications

Notre méthode

Nous contacter

Nous trouver

Rue De Carouge 58
1205 Genève
076 579 67 78
022 558 06 56